Quel impact l’entretien des haies a-t-il sur la communauté d’oiseaux du bocage avesnois ?
L’Avesnois est une région située dans le sud du département du Nord, réputée pour ses prairies, ses vergers hautes tiges, ses rivières sinueuses et ses fromages, dont le célèbre Maroilles. L’exploitation agricole locale, principalement axée sur l’élevage laitier, a modelé son paysage, caractérisé par le bocage. Dans le Parc naturel régional de l’Avesnois (cf. carte ci-dessous), on compte aujourd’hui 53 000 hectares de prairies et plus de 11 500 km de haies, dont le maintien constitue une priorité.
Des dispositifs ont ainsi été mis en place pour conserver la longueur du linéaire de haies, notamment en aidant les agriculteurs à les entretenir, ceci sans nécessairement prendre en compte la qualité de ce réseau de haies. Or, sa capacité d’accueil pour la faune sauvage semble s’être dégradée ces dernières années. Les apiculteurs locaux le constatent, faisant état de dysfonctionnements dans la relation abeille-milieu environnant. Et les chasseurs s’interrogent aussi, soupçonnant un impact de la qualité de ces haies sur les oiseaux et plus largement sur la faune sauvage.
Tous concernés par le sujet, le Parc naturel régional de l’Avesnois, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, la Fédération départementale des chasseurs du Nord et la
Fédération régionale des chasseurs du Nord-Pas-de-Calais ont décidé de conduire ensemble une étude pour approfondir la connaissance de la relation entre les modalités d’entretien des haies de cette région bocagère et les oiseaux.
Cette étude s’est déroulée en plusieurs temps :
Tout d’abord, une mise à jour du recensement des haies et de leurs typologies a été réalisée dans les secteurs choisis pour les relevés de terrain,
Au printemps 2011, des comptages ont été réalisés sur 90 unités sélectionnées en fonction du mode d’entretien dominant (haies hautes / haies basses) pour évaluer sa relation avec la communauté d’oiseaux nicheurs,
Pendant l’automne-hiver 2011, c’est le lien entre le mode d’entretien et la présence d’oiseaux dont le régime alimentaire est principalement composé de fruits qui a été analysé.
Les résultats de ces deux volets ont confirmé les impressions de « dysfonctionnement » entre milieu et faune sauvage évoquées par les acteurs locaux. Ils ont permis d’affirmer qu’un bocage constitué de haies hautes et larges, donc faiblement taillées, accueille une avifaune
nicheuse plus riche, plus abondante, plus diversifiée et d’un plus grand intérêt patrimonial qu’un bocage constitué de haies basses et étroites, donc fortement taillées. Ils ont également montré que les modalités d’entretien des haies ont un impact sur la présence de fruits et par conséquent sur la présence d’oiseaux frugivores en hiver (grives, merle,...).
Ces conclusions ont également mis en évidence l’inadéquation entre les cahiers des charges des mesures agri-environnementales de l’Avesnois relatives aux haies et l’objectif d’amélioration de la biodiversité que ces dispositifs visent. En effet, il y a encore un an, ces derniers conduisaient finalement à mieux rémunérer les pratiques les moins favorables, notamment l’entretien annuel des haies sur au moins deux faces.
La suite de ce travail va bien évidemment consister à diffuser les connaissances acquises dans l’Avesnois, auprès des gestionnaires des haies locaux, mais aussi d’autres régions bocagères, pour améliorer les pratiques d’entretien. Il s’agira également de viser un public plus large,
jusqu’aux administrations et collectivités, afin qu’une réflexion soit menée sur l’évolution des logiques de financement, au niveau local, mais aussi national, voire européen notamment dans le cadre de la prochaine réforme de la politique agricole commune.
Quelques conseils d’entretien
Entretenir les haies en janvier, février ou mars, afin de respecter les périodes de
reproduction de la faune et de fructification des haies
Ne pas intervenir tous les ans sur la même haie et répartir les travaux sur le territoire
Veiller à maintenir des arbres de haut jet
Favoriser le développement d’une haie large
Maintenir un ourlet herbeux au pied de la haie
Utiliser un matériel de coupe bien entretenu et adapté au diamètre des branches
Eventuellement renforcer les haies avec des essences fructifères
Rédaction : Nathalie CHEVALLIER, Office national de la chasse et de la faune sauvage, Cellule technique DIR Nord-Ouest
En collaboration avec :
Maxime AMY, Parc Naturel Régional de l’Avesnois
Bénédicte GUILLOTTE, ONCFS Cellule technique DIR Nord-Ouest
Pauline CABARET, Parc Naturel Régional de l’Avesnois
Cyril ERAUD, ONCFS CNERA Avifaune migratrice
Damien BREBION, Fédération Départementale des Chasseurs du Nord
Matthieu DESEURE, Fédération Régionale des Chasseurs du Nord – Pas-de-Calais
Sophie MORIN, ONCFS Pôle bocage
Références bibliographiques issues de l’étude réalisée dans l’Avesnois
AMY M., 2011 - Impact des modes de gestion du bocage de l’Avesnois sur la communauté d’oiseaux nicheurs des haies. Mémoire de stage Master 2 Ingénierie de la Biodiversité de l’Université Paul Cézanne Aix-Marseille III, Parc naturel régional de l’Avesnois, 50 p.
AMY M., CHEVALLIER N., ERAUD C. & CABARET P., 2013.- Impact des modes de gestion du bocage de l’Avesnois sur la communauté d’oiseaux nicheurs des haies. Alauda, 81 (1) : 49-62.
15 pages / 4.679 ko
CHEVALLIER N., AMY M., GUILLOTTE B., ERAUD C., CABARET P., BREBION D., DESEURE M. & MORIN S., 2013- L’entretien des haies a-t-il un impact sur la communauté d’oiseaux du bocage de l’Avesnois ? Faune Sauvage, N° 299, 2e trimestre 2013.
7 pages / 3 361 ko